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Les microbes, à quoi ça sert?

Les microbes, à quoi ça sert?

  Photographe : Shutterstock

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Les microbes, à quoi ça sert?

Les microbes, qu’on fuit comme la peste depuis la pandémie, sont plus utiles qu’on pense. 

Oui, certains peuvent nous rendre malades, mais la plupart d’entre eux ne sont pas dangereux. Ils sont même assez nombreux à nous apporter des bienfaits. Découvrez les avantages insoupçonnés des microbes qui nous entourent.

 

Le mot «microbe» est un terme générique qui englobe tous les microorganismes invisibles à l’œil nu. «Cela inclut notamment les bactéries, les virus et les champignons, comme les levures», indique Patrick Fillion, microbiologiste et enseignant au département de biologie du Cégep de l’Outaouais.

Les microbes sont les premiers organismes vivants à être apparus sur la Terre. Et encore aujourd’hui, même si l’on ne les voit pas, ils sont partout autour de nous. On en trouve notamment dans l’air, l’eau, la terre, nos maisons et la nourriture. Même notre corps abrite 100 000 milliards de microbes! «On a plus de microorganismes dans notre corps qu’on a de cellules, illustre Nathalie Thibault, microbiologiste chez ValkarTech, une firme de consultation en hygiène et salubrité. Ils vivent avec nous et l’on a besoin d’eux.»

Selon Patrick Fillion, entre 70 et 80 % des microbes, tous genres confondus, sont bénéfiques ou neutres pour l’humain. «C’est-à-dire qu’ils vont vivre sur nous, en nous ou dans notre environnement, mais qu’ils ne nous rendront jamais malades, dit-il. Il n’y a que de 20 à 30 % des microorganismes qui représentent un potentiel pathogène.»

 

Les microbes et leurs utilités

«Sans qu’on s’en rende compte, chaque jour, les microorganismes ont un effet positif pour nous, indique Patrick Fillion. Sans eux, notre vie ne serait pas la même.»

Des milliards de microorganismes s’activent dans notre intestin; c’est notre microbiote intestinal. On y trouve surtout des bactéries, mais aussi des virus, des champignons et des levures. «Cette colonie microbienne joue un rôle dans la digestion et l’absorption des médicaments, la sécrétion d’hormones et l’entraînement du système immunitaire, et nous protège des envahisseurs microbiens indésirables», écrit Boucar Diouf dans son livre La face cachée du grand monde des microbes.

Les bonnes bactéries de notre microbiote dégradent les aliments pour qu’on en absorbe les nutriments. «Elles prennent aussi les bonnes “places de stationnement” dans notre intestin pour que les bactéries pathogènes qu’on avale parfois dans la nourriture ne puissent pas s’implanter», explique Nathalie Thibault.
«Par exemple, si l’on mange du poulet qui n’a pas été assez cuit et qu’on avale quelques salmonelles, les bonnes bactéries de notre intestin vont les empêcher de se multiplier, si elles ne sont pas trop nombreuses», poursuit Patrick Fillion.

Par ailleurs, de plus en plus d’études affirment qu’un microbiote en santé pourrait aider à prévenir l’anxiété, la dépression, les maladies cardiovasculaires, les maladies inflammatoires de l’intestin, le diabète, l’obésité et les allergies.

Pour exercer ses fonctions, le microbiote doit toutefois contenir plusieurs sortes de microbes. Et on peut l’aider dans sa tâche en mangeant une variété de fruits et légumes, en privilégiant les grains entiers, les légumineuses, les graines, les noix et les aliments contenant des probiotiques.

 

Ils cuisinent pour nous

C’est grâce à l’action des microbes qu’on peut consommer des produits comme le vin, la bière, le kombucha, le kéfir, le yogourt, le fromage, le pain et la choucroute. Les microbes transforment les aliments en d’autres aliments par fermentation. C’est ainsi que la levure permet à la pâte de gonfler pour devenir du pain, que la bactérie Lactobacillus bulgaricus transforme le lait en yogourt et que le champignon Penicillium roqueforti est utilisé pour fabriquer le fromage bleu.

La fermentation se produit lorsque des microorganismes (naturellement présents dans un aliment ou ajoutés) restent en contact pendant un certain temps avec les glucides d’un aliment. Ces microorganismes (levures, bactéries, moisissures) transforment les glucides en alcools ou en acides. Ce processus a l’avantage d’intensifier le goût des aliments. «Par exemple, tous les goûts particuliers des fromages proviennent des microorganismes qui les fermentent», signale Nathalie Thibault.

Un autre atout: les microorganismes qui produisent la fermentation permettent de conserver les aliments plus longtemps. De plus, les bactéries contenues dans les aliments fermentés sont excellentes pour notre microbiote.

 

aliments fermentés

© iStock

 
Ils nous parfument

Notre odeur est aussi liée à l’effet des bactéries. Lorsqu’on sue, ce n’est pas notre sueur qui dégage une mauvaise odeur. La sueur est naturellement inodore. C’est au contact des bactéries qui se trouvent sur notre peau qu’elle devient odorante. «Les bactéries se nourrissent de notre sueur et elles produisent des substances, un peu comme nos gaz intestinaux, qui ont un pouvoir odorant. Quand on se lave, on élimine une partie des bactéries et des substances produites. C’est ce qui permet de retrouver une senteur plus agréable», dit Patrick Fillion.

Ces bactéries qui vivent sur nous nous donnent aussi notre odeur caractéristique. «D’une personne à une autre, et en fonction du type de peau, les bactéries ne sont pas les mêmes, explique l’enseignant. Il en existe une belle diversité.» C’est cette diversité d’odeurs qui permet notamment aux amoureux et aux amis de connecter entre eux. Comme le rappelle Boucar Diouf dans son livre, «J’aime ton odeur» est le premier compliment que sa conjointe lui a fait. Une étude israélienne récente a aussi montré que les amitiés qui se développent rapidement le sont souvent entre des personnes qui dégagent des odeurs similaires.

 

Ils nous guérissent

Une des plus grandes découvertes de la médecine, les antibiotiques, nous vient des microbes. C’est le médecin écossais Alexander Fleming qui a découvert par hasard, en 1928, qu’un champignon appelé Penicillium notatum sécrétait une substance qui empêchait la croissance des bactéries. C’est grâce à son travail et à celui de plusieurs autres chercheurs européens et américains que le premier antibiotique, la pénicilline, a commencé à être utilisé dans les années 1940 contre les infections bactériennes. Depuis, la pénicilline et ses dérivés ne se sont pas contentés de sauver des millions de personnes, ils ont aussi augmenté notre espérance de vie.

La médecine cherche souvent à faire appel aux microbes pour soigner les patients. Une des dernières innovations est la greffe fécale, qui peut venir à bout d’infections intestinales graves qui ne guérissent pas à l’aide d’antibiotiques. «Il s’agit d’introduire les selles saines d’un donneur dans le tube digestif de la personne malade, explique Patrick Fillion. Cette énorme quantité de bonnes bactéries travaille alors à éliminer les bactéries problématiques dans l’intestin.»

Autre avenue prometteuse, «des chercheurs travaillent à développer des virus génétiquement modifiés pour s’attaquer aux tumeurs cancéreuses», ajoute l’enseignant.

 

Ils nettoient la planète

Plusieurs bactéries travaillent pour le bien de l’environnement. Par exemple, il existe dans les mers une bactérie capable de se nourrir de pétrole. Bien sûr, elle ne fait pas tout le travail de dépollution, mais elle peut aider à nettoyer lorsqu’il y a des marées noires. D’autres mangent des métaux toxiques dans la terre.

«Au Cégep de l’Outaouais, une équipe cultive des bactéries qui arrivent à dégrader les microplastiques, indique Patrick Fillion. Grâce à un partenariat avec la Ville de Gatineau, on veut utiliser ces bactéries pour diminuer la pollution plastique dans les eaux usées avant qu’elles ne soient rejetées dans nos cours d’eau.» Les usines de traitement des eaux usées des villes font d’ailleurs déjà appel à des bactéries pour dégrader les matières fécales et organiques.

«Le compostage est aussi attribuable au travail des bactéries et des moisissures, souligne Nathalie Thibault. Ce sont elles qui décomposent les matières organiques pour que le cycle reprenne, que le sol soit nourri et que d’autres plantes poussent.» 

 

Une bactérie ou un virus?

«Une bactérie, c’est un microorganisme autonome, dit Nathalie Thibault. Elle mange et se multiplie en dehors du corps humain. Il y en a partout.» Les bactéries sont mille fois plus petites qu’un millimètre. Les virus, eux, agissent un peu comme des parasites. «Ils ont besoin d’entrer dans une cellule vivante pour survivre et se multiplier», ajoute-t-elle. Ils sont jusqu’à mille fois plus petits que les bactéries.

 

Combien de temps les microbes vivent-ils?

«Les virus respiratoires, comme ceux du rhume et de la grippe, peuvent vivre deux jours sur les surfaces et de 10 à 30 minutes sur les mains, indique Nathalie Thibault. Le virus de la gastro, lui, peut vivre deux semaines sur les surfaces et quatre heures sur les mains.»

Les bactéries vivent plus longtemps: pendant plusieurs jours, plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Elles se nourrissent d’eau et de matière organique, comme les sucres, les gras et la saleté. Tant qu’elles mangent, elles se multiplient!

Pour éviter que les mauvais microbes nous rendent malades, la règle de base est de garder sa maison propre. «La propreté rend plus difficile la survie des microbes sur les surfaces, parce qu’on leur donne moins de nourriture, et donc moins de chances de se multiplier», explique la microbiologiste.

Mme Thibault conseille aussi de désinfecter chaque semaine l’évier, le comptoir de la cuisine, de même que le frigo et les toilettes. «Quand tout le monde est en santé, c’est suffisant», dit-elle. Mais si quelqu’un est malade, on désinfecte plus souvent et l’on ajoute les poignées de porte. «Pour ce faire, on laisse le désinfectant assez longtemps sur la surface pour qu’il agisse. Lisez bien les instructions. Il faut généralement attendre une dizaine de minutes avant de frotter pour qu’une désinfection s’opère», souligne la microbiologiste, qui précise qu’il faut aussi se laver souvent les mains.

 

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