Psychologie

Je ne veux pas d'enfant!

Je ne veux pas d'enfant!

  Photographe : Marie-Eve Tremblay | Colagene.com

Mon amie Cathy vient d’accoucher. Je suis complètement gaga devant ce petit humain chauve et édenté! Je le berce doucement et j’apprécie sa légère odeur de poudre. Je l’aime beaucoup mais... je ne veux pas d’enfant.

La première fois que je l’ai avoué à ma mère, j’étais dans la jeune vingtaine. Elle m’a regardée avec un air surpris et a rapidement rejeté mon affirmation en prétextant que je n’avais pas encore trouvé mon prince charmant. Selon elle, lorsque l’homme de ma vie se présenterait, je changerais d’idée.

Chaque fois que j’ai trouvé l’amour, j’ai rapidement annoncé mes couleurs: je ne souhaite pas fonder une famille. Ces hommes m’ont tous regardée de travers, l’air de dire: «Qu’est-ce qui cloche chez cette femme?» Chaque fois, ça m’a heurtée. Certains sont restés malgré tout, en entretenant l’espoir que l’amour me transforme. Voyant que ce n’était pas le cas, ils ont rompu.

La maternité, ce n’est pas pour moi. La psychologue Hélène Racicot le confirme: «Avoir un enfant est un grand renoncement de soi. Si l’on n’en souhaite pas, il est sage de ne pas en avoir.»

Je suis en paix avec mon choix, même si tout le monde cherche une explication. Est-ce que j’ai une mauvaise relation avec mes parents? Est-ce que je suis incapable d’attachement? Est-ce que je me déteste au point de ne pas avoir envie de transmettre ma génétique à un autre être humain? Si ces raisons sont valables pour certaines femmes, elles ne collent pas à ma réalité. J’ai simplement l’impression de pouvoir contribuer autrement à la société. «Les femmes d’aujourd’hui ont été élevées pour être sur le marché du travail et non pas pour rester à la maison et élever des enfants, résume Mme Racicot. On a valorisé nos filles dans leurs études et, après, on dit qu’on veut être grands-mères. Il y a une contradiction dans tout cela.»

Hélène Racicot a mis le doigt sur ce qui me dérange: me faire constamment poser la même question. Je trouve épuisant d’avoir à justifier mon choix de vie. Mais surtout, ça me blesse qu’on diminue ma valeur personnelle, parce que je ne souhaite pas enfanter. Je deviens une amoureuse de second ordre, une fille indigne qui va arrêter la lignée familiale, une amie étrange qui dérange.

Personnellement, je préfère me voir comme une boulimique de voyages, une confidente qu’on peut déranger n’importe quand et une super tatie gâteau pour le beau Léo.

Vous n’avez pas idée des commentaires qu’on me fait: sans enfant, tu ne seras jamais une VRAIE femme... quand tu vas vieillir seule, tu vas le regretter... il y a tellement de femmes infertiles qui voudraient des enfants... Croyez-moi, je les ai tous entendus!

Le jugement de la société ne m’affecte pas. Mais mon statut marginal me rend sensible au malaise de mes proches. Ce sont eux qui comprennent le moins. Selon Hélène Racicot, «quand on aime la maternité, il est difficile de comprendre qu’une femme n’en veuille pas. Les proches ont souvent peur que la personne éprouve des regrets, un jour, car la fertilité chez une femme est limitée dans le temps.» Maintenant que j’ai passé la quarantaine, j’évite effectivement le sujet avec ma mère, qui pleure chaque fois qu’on lui rappelle que je ne ferai jamais d’elle une grand-mère. 

Pourtant, je ne suis pas la seule à rejeter le modèle féminin traditionnel. Nous sommes de plus en plus nombreuses. La psychologue et psychanalyste Marie Hazan explique cela par le fait que «les sociétés modernes fonctionnent davantage autour de l’individu et de la solitude».

Est-ce que j’ai déjà remis mon choix en question? Non, même s’il y a présentement un prince charmant dans ma vie et que je viens d’avoir 41 ans. Je suis heureuse. Et puisque Léo pleure pour qu’on change sa couche, je n’ai qu’à le déposer dans les bras de sa mère. Il s’apaise et moi, je retrouve la liberté qui m’est si chère. C’est parfait ainsi.

 

Propos recueillis par Josée Bournival

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