Psychologie
Comment aider nos aînés à vaincre l'isolement
Photographe : Shutterstock
Psychologie
Comment aider nos aînés à vaincre l'isolement
Le confinement a mis en évidence l'isolement des personnes âgées. Même si les mesures ont été assouplies, maintenir un lien social en période de crise demeure essentiel. Qu’il s’agisse de nos proches ou d’inconnus, voici des conseils pour rompre leur solitude.
Confiner les aînés plus longtemps que le reste de la population semble logique, puisqu’ils sont plus à risque de décéder de la COVID-19, mais les effets collatéraux d’une telle décision ne peuvent être négligés.
L’humain étant un être social, selon Brené Brown, une chercheuse américaine, notre besoin de contacts est plus qu’une émotion, c’est de la neuroscience. Nous sommes conçus pour interagir, et l’absence de contacts peut ainsi nous nuire, autant mentalement que physiquement. «Si l’on n’a personne avec qui partager notre vie, il peut être difficile de lui trouver du sens», confirme Caroline Sauriol, directrice générale de l’organisme Les Petits Frères, qui lutte contre l’isolement des personnes de 75 ans et plus au Québec depuis près de 60 ans.
Comment aider nos proches?
Selon la psychologue Marie-Claude Boulet, même les petits gestes, comme demander «Comment ça va?» ou «Qu’est- ce que je peux faire?», ont un effet positif. Le soutien peut être affectif: on appelle ou on écrit à la personne pour prendre de ses nouvelles. On s’assure aussi de ne pas cantonner la conversation à la crise actuelle. «Bien sûr, il sera question de la COVID, mais attention de garder un discours rassurant, de ne pas tomber dans le sensationnalisme et de parler d’autres choses», conseille Mme Boulet.
Si c’est possible, on privilégie la visioconférence. «La vidéo permet de voir l’autre sourire. Le procédé a un effet miroir et fait du bien», affirme la psychologue. De plus, elle permet d’avoir l’impression de partager le quotidien en prenant un repas ensemble ou en découvrant les dernières réalisations des enfants.
Si notre proche est en CHSLD, on se renseigne auprès de la direction afin de vérifier quels sont les modes de communication possibles.
Le soutien peut aussi être pratique. Les personnes confinées ont un moindre accès à de nombreux services. On s’informe donc sur leurs besoins. On peut aller faire l’épicerie, aider avec les tâches administratives ou tondre la pelouse. Ces petits gestes feront une différence dans la journée de la personne qui les reçoit, sans compter qu’ils font aussi du bien à celui qui les pose.
En plus du bien-être qu’ils procurent, les contacts fréquents avec nos proches âgés nous permettent de nous informer régulièrement sur leur santé physique et psychologique: «On peut ainsi repérer les signes d’éventuels problèmes. Nous sommes comme une sentinelle pour eux», explique Mme Boulet.
© Unsplash | Nick Karvounis
Et les personnes seules?
Avant le confinement, certaines personnes ayant un réseau personnel réduit avaient développé des stratégies pour briser leur solitude, telle une visite quotidienne au café du coin. «Étant donné la situation actuelle, ces stratégies ne fonctionnent plus, et ces personnes risquent donc de perdre espoir, en plus de leur estime d’elles-mêmes», explique Caroline Sauriol des Petits Frères.
Dès le début de la crise, l’organisme s’est assuré que ses 1700 grands amis — c’est ainsi qu’on nomme les personnes bénéficiant de leurs services — étaient en sécurité en les appelant deux fois par semaine. Puis, il a étendu son réseau aux autres Québécois de 75 ans et plus avec son programme d’escouade téléphonique. Les appels durent un minimum de 20 minutes et se font autant que possible avec le même bénévole pour assurer une continuité. L’organisme regroupe 2000 bénévoles répartis dans 11 régions du Québec et travaille avec d’autres groupes et associations dans le but de repérer le plus d’aînés isolés que possible.
À plus petite échelle, plusieurs initiatives pour contrer l’isolement des personnes âgées ont vu le jour ces derniers mois. Par exemple, le projet Portraits et paroles de nos AînéEs, sur Facebook, porté par deux sœurs de 10 et 12 ans, consiste à recueillir des témoignages de personnes âgées, grâce à une rencontre virtuelle, puis à les publier sur sa page.
Des milliers de personnes se sont également inscrites sur le site jebenevole.ca, plateforme de jumelage entre organismes et bénévoles, tandis que d’autres ont offert de l’aide à leurs voisins, comme en témoigne Geneviève Despatie: «Je fais l’épicerie pour ma voisine de 80 ans. Elle m’envoie ses demandes par texto. On se parle avant et après les courses. On fait connaissance, car on ne se connaissait pas vraiment avant la crise», raconte la Montréalaise.
Et après?
Le risque, après plusieurs mois, c’est que la mobilisation s’essouffle et que l’on reprenne «nos vieilles habitudes». «Il va falloir être vigilant et ne pas baisser la garde, car plus le temps passe, plus il y a un risque d’impact psychologique», prévient Marie-Claude Boulet. Pour Caroline Sauriol, la prise de conscience provoquée par la pandémie est une belle avancée. «On a développé des réflexes positifs pendant la crise; autant les garder. Je nous encourage, comme société, à ne pas revenir à la normale et à continuer d’entretenir des relations intergénérationnelles», conclut-elle.
LIGNE DES PETITS FRÈRES pour les personnes de 75 ans et plus: 1 877 805-1955
© Unsplash | Andre Ouellet