À quoi ressemblera notre vie dans 30 ans?

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Au travail

Moins de 9 à 5, des travailleurs qui occupent différents emplois au cours de leur vie, davantage de gens qui travaillent après 65 ans... Ce sont là des tendances qu'on voit s'installer et qui deviendront probablement la norme d'ici 30 ans. Mais le monde du travail connaîtra bien d'autres révolutions.

Davantage de travail en équipe et en réseau. «Je pense que les travailleurs auront beaucoup plus d'autonomie et de responsabilités d'équipe, avance Diane-Gabrielle Tremblay, spécialiste en gestion des ressources humaines, en économie et en sociologie du travail. En fait, dans bien des secteurs, la structure hiérarchique qu'on connaît actuellement risque de disparaître. » De plus, comme les technologies se seront développées en ce sens, on travaillera davantage en réseau, souvent au sein d'équipes multidisciplinaires. C'est d'ailleurs dans cet esprit que le coworking - tendance voulant que des employés de divers secteurs partagent un même lieu de travail - gagne en popularité. Selon Deskwanted, le gestionnaire allemand du coworking, le nombre d'espaces de ce genre double chaque année depuis 2010 (on en compte aujourd'hui 2 000 à travers le monde).

Les femmes auront accès à de meilleurs emplois. La présence de femmes à des postes traditionnellement réservés aux hommes, par exemple dans les milieux de la finance, comme chef de direction, etc., continuera de croître. «Cela sera dû à une scolarisation meilleure et à une évolution des mentalités, croit Mme Tremblay, mais aussi au fait que des mesures de conciliation travail-famille encore plus efficaces auront été mises en place.»

Les entreprises seront plus engagées. Les entreprises comme Patagonia, qui ont adopté une mission sociale et des valeurs axées sur la préservation de l'environnement, seront de plus en plus nombreuses. De fait, des études révèlent que ces entreprises attirent, et conser- vent plus longtemps, les meilleurs employés.

Mon souhait «Qu'il y ait davantage de mesures de conciliation travail-famille et une plus grande souplesse en ce qui concerne l'horaire de travail. J'ai bon espoir que mon souhait se réalise, car la demande en ce sens est forte. Je souhaite aussi une meilleure intégration du marché du travail pour les jeunes et les aînés.» - Diane-Gabrielle Tremblay

Notre santé, physique et mentale

S'il est un mot d'ordre qui touchera toutes les sphères de notre vie, c'est «personnalisation». Et la santé n'y échappe pas.

De la médecine sur mesure? Selon le Dr Michael Snyder, directeur du Centre de génomique et de médecine personnalisée de Stanford, la technologie permettra bientôt d'offrir à chaque personne un plan de prévention (quoi manger, quel mode de vie adopter, etc.) selon son profil génétique. Dans ce même courant, les thérapies dites ciblées profitent aussi des avancées technologiques: «Actuellement, elles sont surtout utilisées pour traiter les cancers, explique le Dr Christian Boukaram, radio-oncologue et auteur du Pouvoir anticancer des émotions. Par exemple, on peut de plus en plus souvent utiliser un médicament précis pour traiter uniquement les cellules cancéreuses, donc sans trop faire de dégât autour. Et qui sait, peut-être nous promènerons-nous un jour avec une puce sous la peau qui contiendra toutes nos informations médicales!»

La médecine intégrative sera privilégiée. «Présentement, la médecine est fragmentée par spécialisations, note le Dr Boukaram. La médecine intégrative, elle, prend en compte le patient en entier, son mode de vie, sa vie sociale, sa santé psychologique.» Elle prend aussi en considération des approches non pharmacologiques si leurs effets sont prouvés, comme le yoga ou la prière. Ainsi, différents types d'intervenants travailleront sous le même toit, de concert avec le patient. «Aux États-Unis notamment, cette approche est beaucoup plus en vogue qu'ici. Mais je crois que d'ici 30 ans, elle sera reconnue», soutient le spécialiste. «D'ailleurs, grâce à cette reconnaissance de la médecine intégrative, les services offerts par les psychologues et les psychothérapeutes seront sans doute encore plus populaires qu'ils ne le sont actuellement », estime Rose-Marie Charest, présidente de l'Ordre des psychologues du Québec.

La télémédecine sera plus courante. «Elle permettra aux spécialistes et aux patients d'interagir via Internet, notamment», croit le Dr Boukaram. Bien entendu, ces rendez-vous virtuels ne pourront remplacer une visite en personne, mais ils permettront d'avoir accès à l'expertise de spécialistes qui se trouvent à l'extérieur de notre région, voire dans d'autres pays. Idem pour les consultations avec un psychologue: «Par exemple, une personne suivie à Val-d'Or pour des troubles de l'alimentation pourra recevoir le soutien d'un psychologue spécialisé basé à Québec», illustre Rose-Marie Charest.

On vivra plus longtemps... et mieux? Un rapport de l'ONU publié en 2013 indique que l'espérance de vie mondiale devrait atteindre 76 ans en 2050. Au Canada? Selon la Société géographique royale du Canada, elle devrait atteindre 81 ans pour les hommes et 86 ans pour les femmes (elle est aujourd'hui respectivement de 79 et 83 ans). Néanmoins, l'Organisation mondiale de la santé identifie comme l'un des principaux défis du 21e siècle les maladies chroniques, telles les cancers, le diabète, l'obésité et les maladies cardiovasculaires. Or, notre espérance de vie mais aussi notre qualité de vie dépendent du fait qu'on aura réussi ou non à renverser la vapeur. Le Dr Boukaram est confiant: «Je pense que d'ici 30 ans, grâce aux technologies mais aussi à la prévention, on vivra plus longtemps et en meilleure santé.»

La technologie sera aussi au profit de la psychologie. Dans le futur, on aura accès à de plus en plus d'applications mobiles offrant un soutien psychologique. Comme l'application No Stress Altitude, développée par des professionnels de la santé, destinée aux personnes qui ont peur de l'avion. «Bien entendu, elles ne remplaceront pas non plus les consultations, mais ces outils pourront s'avérer utiles pour certains», note Rose-Marie Charest.

Mon souhait «Que la santé mentale prenne autant d'importance que la santé physique, notamment sur le plan de la recherche, de la prévention et de l'accès aux soins.» - Rose-Marie Charest

Notre alimentation

Selon une étude de la Banque de développement du Canada, 33% des Canadiens sont prêts à payer davantage pour des produits qui favorisent une meilleure santé. Une tendance-clé en alimentation notamment, qui ne fera que croître au fil des prochaines décennies, selon Sylvie Turgeon, directrice par intérim de l'Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels, et enseignante au département des sciences des aliments et de nutrition de l'Université Laval.

Notre santé, au coeur de nos préoccupations. «Je crois que dans 30 ans, on aura développé des outils technologiques qui permettront de savoir de quels aliments chaque personne a besoin, selon sa génétique, pour être en santé et prévenir les maladies, avance la spécialiste. Aussi, la pilule-repas qu'on imaginait dans les années 90 pour l'an 2000 n'est peut-être pas encore pour demain, mais disons que les suppléments sous cette forme sont de plus en plus populaires. Mais qu'on se rassure, selon nos recherches, le goût et le plaisir de manger resteront des critères essentiels.»

Celle de notre planète aussi! On note un souci accru de connaître la provenance des aliments qu'on consomme ainsi que leur mode de production et un penchant marqué pour les produits naturels, biologiques. «On observe déjà ces tendances, mais elles seront encore plus prononcées dans l'avenir, cela par souci de notre propre santé, bien sûr, mais aussi de celle de notre planète», dit Mme Turgeon.

Des bibittes dans notre assiette? «Des chercheurs, européens pour la plupart, cherchent actuellement des alternatives à la viande pour l'avenir. Les insectes constituent l'un des objets de leurs recherches», explique Sylvie Turgeon. Par ailleurs, parmi les innovations alimentaires dont on a le plus parlé lors du dernier Salon international de l'agroalimentaire en 2012, notons les emballages comestibles, les nouveaux produits biologiques et à base de fruits et de légumes ainsi que les formats individuels.

Mon souhait «Qu'on arrive à trouver une façon de produire les aliments de façon qu'il y ait un meilleur équilibre planétaire.» - Sylvie Turgeon

Les médias

«Les médias ne disparaîtront pas, mais ils prendront assurément d'autres formes», avance Pierre Trudel, directeur du Centre d'études sur les médias. D'autres prévisions?

L'information sera beaucoup plus personnalisée. «Les médias de masse seront en net recul et les grands journaux télévisés n'existeront probablement plus, croit M. Trudel. En revanche, comme on sera tous très "connectés", on pourra recevoir de l'information personnalisée, via nos téléphones ou d'autres moyens, du genre lunettes Google, liée directement à nos intérêts.» Selon l'expert, on peut aussi penser que la réalité augmentée, une technologie qui est en train de percer, permettra de recevoir l'information non seulement en la lisant ou en l'écoutant, mais en la vivant presque! «Ça passera par tous nos sens, ça deviendra des expériences interactives», soutient M. Trudel.

Le journalisme de données sera plus usuel. Ce type de journalisme, une forme de traitement de l'information où le journaliste part de données pour les transformer en une visualisation graphique conviviale, sera davantage exploité à cause, justement, de la masse de données qui sera plus importante et plus accessible.

Beaucoup d'outils seront consacrés au fact checking. S'assurer de la véracité des faits est à la base même du journalisme. Mais vu le nombre grandissant d'informations véhiculées et une perspective généralement plus critique du monde politique, les sites Web consacrés à la vérification des renseignements, surtout ceux fournis par les politiciens, ne cesseront d'augmenter. On en dénombrerait au moins une soixantaine aujourd'hui à travers le monde. L'un des plus crédibles, PolitiFact, une initiative du Tampa Bay Times, a d'ailleurs remporté un prix Pulitzer en 2009.

Mon souhait «Je souhaite qu'on ne perde jamais de vue les valeurs de la démocratie, qu'il y ait toujours des échanges et une ouverture.» - Pierre Trudel

Les villes et les transports

Selon un rapport des Nations Unies, 70% de la population habitera dans une ville d'ici 2050. Mais attention! On devra sans doute revoir notre idée même de ce qu'est une ville tant elle risque de changer de visage au cours des prochaines décennies.

Des espaces complètement repensés. Les villes vont sûrement se densifier mais aussi s'étendre. Pour cette raison, Stéphane Roche, professeur au département des sciences géomatiques de l'Université Laval, croit qu'il faut oublier les notions comme centre-ville, quartiers résidentiels, industriels, etc. «Dans l'avenir, les villes se dessineront autour de nous, de nos habitudes de vie, dit-il. Les espaces réservés au travail, aux loisirs, à la consommation se fusionneront et seront plus proches de notre lieu de résidence.» Louise Guay, directrice générale de LivingLab Montréal, un centre de création et d'innovation qui travaille au développement de la ville d'aujourd'hui, abonde dans le même sens. «Je pense aussi qu'on verra dans l'avenir des sortes de centres de revitalisation économique où seront regroupés différents services. Des lieux où on ira travailler, où on pourra faire garder nos enfants, échanger avec d'autres travailleurs de différents secteurs, manger, s'adonner à tel loisir, etc.»

Des villes intelligentes et vertes. «On sera tous connectés et bientôt les objets pourront nous "reconnaître", déterminer nos habitudes et anticiper nos besoins, avance M. Roche. Par exemple, on pourra savoir en temps réel que plusieurs personnes attendent l'autobus à tel endroit et envoyer plus de véhicules. Autre exemple: selon l'endroit où on se trouve, notre téléphone pourra nous transmettre spontanément des informations à propos de services ou de produits situés aux alentours susceptibles de nous intéresser.» Toits végétaux, multiplication des espaces verts, systèmes efficaces de gestion de déchets et de récupération, énergie solaire, aménagement des rues en fonction de l'ensoleillement... Autant d'initiatives qui se développeront davantage ou verront le jour dans l'avenir.

La disparition des voitures? «Je crois que l'utilisation individuelle de la voiture n'existera quasiment plus, avance Louise Guay. Je pense qu'il y aura une prolifération de systèmes libre service du style Communauto et des Bixis.» On peut également présumer que les énergies fossiles ne seront plus utilisées (ou presque) au profit de l'électricité et que les véhicules seront beaucoup moins énergivores. C'est en tous cas ce que prévoit Transports Québec pour 2030!

Mon souhait «Je souhaite qu'on réalise l'impact qu'on a sur nos villes, qu'on s'engage dans notre communauté et qu'on s'approprie la technologie plutôt que de la subir.» - Stéphane Roche

L'environnement

S'il y a un domaine où il est difficile d'esquisser l'avenir, c'est bien celui de notre planète. Selon un rapport des Nations Unies paru en 2012, «des seuil critiques seront bientôt atteints au-delà desquels des changements brusques et irréversibles peuvent survenir, qui affecteraient les fonctions vitales de notre planète.» Louise Vandelac, sociologue et directrice de l'Institut de l'Environnement de l'UQAM, le confirme: «L'avenir de notre planète dépend beaucoup des mesures qu'on prendra dans les cinq prochaines années.»

Des énergies plus vertes. Selon l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la croissance du marché de l'énergie éolienne et solaire est de 30 % depuis les cinq dernières années. Néanmoins, une expansion spectaculaire des énergies renouvelables serait utopique, du moins à court terme, étant donné la prédominance du pétrole et du gaz comme sources d'énergie. Et dans 30 ans? «J'ose espérer que l'urgence de la situation nous aura fait agir et que le pétrole aura disparu au profit de l'électricité ou de l'hydrogène», lance François Cardinal, journaliste de La Presse spécialisé en environnement.

Une agriculture repensée. À l'heure actuelle, l'agriculture a un impact dévastateur sur l'environnement (pollution de l'eau, émissions de gaz à effet de serre, réduction de la biodiversité, etc.), et selon les Nations Unies, le pire est à craindre si rien n'est fait. Réduction des fertilisants, diminution de notre consommation de viande, entreprises de production agricole plus petites, fermes verticales, création de nouvelles variétés de plantes résistantes à la sécheresse, alimentation locale, etc. Autant de solutions dont on espère qu'elles se concrétiseront et auront un impact direct sur notre mode de vie.

Fini, les déchets? «Je pense que dans 30 ans, la notion même de déchets aura disparu, estime François Cardinal. Je crois qu'on arrivera à tout récupérer pour le transformer en énergie et en carburant. » Un voeu pieux? Pas nécessairement puisque les procédés de transformation des déchets sont de plus en plus nombreux et sophistiqués. Il n'y a pas si longtemps, l'idée qu'une voiture pourrait rouler grâce aux déchets (biogaz) serait apparue pour le moins farfelue!

Mon souhait  «Qu'on puisse se dire, dans 30 ans, qu'on a fait ce qu'il fallait pour préserver l'environnement.» - Louise Vandelac

 
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