Vie de famille

Être maman, autrement

Être maman, autrement

  Photographe : Lucila Perini | agoodson.com

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Être maman, autrement

Ma fille a atteint l’âge adulte. Étant majeure, elle peut désormais voter, sortir dans un bar en toute légalité et s’occuper de son passeport. 

Je suis et serai toujours sa mère, mais je sens que mon rôle de guide se transforme.

 

D’abord autoritaire et directive, je suis devenue celle qui suggère. Parce que vient un temps où l’on est assez mûre pour faire ses propres choix. 

«Quand on est le parent de jeunes enfants, il y a une prise en charge qui vient souvent avec une certaine lourdeur mentale et physique. À mesure que les enfants grandissent, on est de moins en moins sollicité. On demeure une ressource, mais on n’est plus in charge», observe Lory Zephyr, psychologue et auteure de Maman en construction et Ça va, maman? Exactement ce que je ressens et que j’apprécie: cette légèreté, cet élan vivifiant, ce nouveau rapport entre nous. Je suis mère d’une adulte et je sens que j’ai de nouvelles ailes.

 

Je n’ai pas été catapultée du jour au lendemain dans une zone de liberté retrouvée. En fait, j’y goûte un peu plus chaque fois qu’elle et son frère soufflent leurs bougies d’anniversaire. Un jour, j’ai entendu dire que la job d’un parent est de rendre ses enfants autonomes, c’est-à-dire d’arriver à ce qu’ils se passent de soi. Ç’a été à la fois une révélation et un petit choc.

Rétrospectivement, je pense que cette phrase a largement guidé ma maternité (je la placerais à égalité avec «Ça va passer!», que je me suis maintes fois répétée lors des crises de dents, de deux ans et d’adolescence, notamment!). Plus ils vieillissent, plus j’ai du temps pour moi et plus j’en profite.

Par chance, je n’ai pas mis ma vie sur pause à leur arrivée. Mes rêves, mes loisirs, mes passions, je les ai gardés bien vivants, grattant quelques minutes ici et là quand ils étaient tout petits, mais m’accordant plus de temps au fil des ans. Je m’en félicite puisque, autrement, j’aurais pu me trouver devant un grand vide. Qui suis-je? Qu’est-ce que j’aime? Que faire de tout ce temps?

«C’est tellement important de ne pas attendre (que les enfants grandissent) pour consacrer du temps à ce qu’on aime. Certaines se sentent coupables si elles ne sont pas dévouées à 100% à leurs enfants», souligne Lory Zephyr. Et désormais, comme j’ai plus de 18 ans d’expérience, c’est le conseil que je distribue aux nouvelles mamans autour de moi. Je ne suis pas amère ni déçue ni à boutte, car j’ai fait de mon mieux pour ne pas m’oublier malgré les tâches et les responsabilités.

Un peu comme lors de nos propres changements de dizaines – et la fameuse crise de la quarantaine –, cette étape symbolique des 18 ans de nos amours apporte une envie de faire un bilan. Chacune peut en tirer diverses conclusions selon sa route, ses doutes, ses efforts, ses défis, ses conflits.

 

maman

© Unsplash | Bence Halmosi

 

De mon côté, je pense mériter une belle étoile dans mon cahier. «Il y a souvent de la gratification quand on voit qu’on a pris les bonnes décisions. Du coup, notre sentiment de compétence parentale se solidifie. Après des années de “est-ce que je suis une bonne maman?” et de nombreux doutes, on est fière de voir ce que notre enfant est devenu», souligne Lory Zephyr.

C’est ce qu’a aussi remarqué Julia, maman ayant 21 ans d’expérience. «Je trouve que tout le travail fait entre 0 et 18 ans ressort à un moment donné. On passe de “tu dois faire ça” à “qu’est-ce que tu penses que tu dois faire?” Nous sommes là pour les guider et les outiller. Puis, un jour, quand ton enfant t’appelle pour une question culinaire ou un cours Hydro-Québec 101... tu vois que la relation est excellente!»

Effectivement, les voir prendre leur envol dans leur vie d’adulte nous fait prendre conscience que tout ce qu’on a mis en place pour les rendre «grands» au fil des ans a porté ses fruits. Tout! Le bon comme le plus ardu: les tableaux de récompenses, les cours parascolaires, les pictogrammes, alouette!

Nécessairement, on n’échappe pas non plus à une réflexion sur notre propre relation avec notre mère. Cette figure d’attachement est trop importante, et ce, peu importe ce qui nous lie à elle. En effet, même si l’on s’était juré qu’on ne ferait JAMAIS comme elle, on réalise qu’on lui ressemble plus qu’on le croit et... que ce n’est pas si grave! «En revisitant notre passé, on apporte plus de nuances sur la mère qu’elle a été. On comprend mieux ce qu’elle a vécu et cela peut même mener à une certaine réparation ou à une réconciliation», soulève la psychologue.

Même si le rôle de mère ne nous définit pas entièrement, il reste que celui-ci teinte grandement notre identité. La réconciliation se fait donc aussi avec soi-même. On fait la paix avec une certaine partie de notre vie, de nos attentes, de nos rêves. Puis, on regarde vers demain. Et l’on sourit, fière du travail accompli. 

 

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