6-12 ans

Parler de la crise environnementale aux enfants

Comment parler de la crise environnementale aux enfants

  Photographe : Stocksy

6-12 ans

Parler de la crise environnementale aux enfants

De plus en plus d’enfants sont préoccupés par les conséquences des changements climatiques, que ce soit la multiplication des catastrophes naturelles, la fonte des glaciers ou la baisse de la biodiversité.

Comment aborder le sujet avec eux... sans les décourager?

 

C’est lorsqu’il perçu, chez sa fille de 12 ans, une pointe de sarcasme dans le discours qu’elle tenait sur son avenir que Germain a compris que quelque chose n’allait pas.

«Nous parlions de pandémie, nous confie ce père de trois enfants, quand Charlotte a lancé que, de toute façon, nous allions mourir du réchauffement de la planète. En discutant, j’ai compris que l’environnement la préoccupait beaucoup et la rendait même anxieuse. Je ne l’avais pas vu venir!»

Charlotte n’est pas seule. Les jeunes s’inquiètent au sujet des changements climatiques, de leurs impacts actuels et des répercussions à long terme.

 

D’un bout à l’autre de la planète

Selon un sondage réalisé au Québec, l’automne dernier, par la Fondation Monique-Fitz-Back et le Conseil national des jeunes ministres de l’environnement auprès de 1100 jeunes de 12 à 18 ans, 90% des enfants et adolescents se disent préoccupés par les changements climatiques. De plus, 15% éprouvent même régulièrement, voire quotidiennement, de l’inquiétude et de l’écoanxiété.

Sur la scène internationale, même constat: 10 000 jeunes âgés de 16 à 25 ans, en provenance de 10 pays, ont été interrogés dans une vaste étude faite en Angleterre. Les résultats, révélés en décembre, sont sans équivoque: 84% des jeunes sondés se disent inquiets et 59% sont très inquiets. Un peu plus de 50% indiquent avoir ressenti de la tristesse, de l’anxiété, de la colère, de l’impuissance, du désespoir et de la culpabilité au moins une fois en pensant aux changements climatiques.

Point intéressant, la détresse vécue par les jeunes est intimement liée à l’inaction des gouvernements... et des adultes en général, montre l’étude.

«Il y a un sentiment de trahison», commente Anne-Sophie Gousse-Lessard, codirectrice du Groupe interdisciplinaire de recherche sur l’écoanxiété et l’engagement citoyen, et professeure associée à l’Institut des sciences de l’environnement de l’Université du Québec à Montréal. «Les jeunes, même s’ils sont d’avis que ce ne sont pas eux qui ont causé ça, sentent qu’ils portent le fardeau de la solution sur leurs épaules, car ils se font dire que c’est leur génération qui va sauver le monde!»

 

Prêcher par l’exemple

Mère de trois enfants de 3, 5 et 7 ans, Ursule parle souvent d’environnement et de changements climatiques à la maison. Elle croit qu’il est important de choisir le moment pour le faire, tout comme la façon. «Si l’on en parle trop, ça peut créer de l’angoisse, indique-t-elle. Il faut savoir doser, ne pas trop insister. Et en parler en toute bienveillance, sans tomber dans la moralisation.»

Comment s’y prend-elle? Par l’action. Ursule et son conjoint aiment rebondir sur l’actualité, la commenter et la critiquer tout en faisant des liens avec le quotidien de la famille. «Ce qu’on veut, au fond, c’est leur donner le goût de faire partie de la solution, raconte-t-elle, et pour ça, on essaie de leur montrer qu’on est un maillon de la chaîne.»

Concrètement, ça s’est traduit par une participation à la ruelle verte du quartier et une conscientisation quant au suremballage, au transport et à la consommation de viande. «Je pense qu’il faut poser des gestes selon les sensibilités, les personnalités et l’âge des enfants, souligne Ursule, et y aller à leur niveau, tous ensemble, à petite échelle.»

Voilà une excellente piste pour calmer le petit écoanxieux ou l’enfant qui se montre soucieux de l’avenir de la planète: se mettre en action... à la hauteur de l’enfant. «Le point d’accroche pour poser un geste ou prendre part à une initiative peut être ce qui intéresse l’enfant, propose Bertille Marton, conseillère pédagogique en environnement au Centre de services scolaire de Montréal (CSSDM). On part de ses passions et de ses connaissances.»

Pour expliquer de quelle manière le discours du parent doit suivre le développement de l’enfant, Mme Marton cite en exemple du contenu sur les papillons, présenté en classe au primaire et décliné selon les cycles. Dans ce cas-ci, au premier cycle (enfants âgés de 6 et 7 ans), les enfants cherchent, dessinent et imitent des papillons; au deuxième cycle (8 et 9 ans), ils abordent leur morphologie, leur alimentation et leur habitat; et finalement, au dernier cycle (10 et 11 ans), les enfants font de la sensibilisation et s’engagent dans la prévention (comment aider à la survie des papillons).

Cette situation hypothétique illustre bien à quel point il est important de tenir le bon discours au moment opportun. «Plus l’enfant évolue, plus il est apte à réfléchir et à entrer dans une perspective de résolution de problèmes, dit Mme Gousse-Lessard. Si l’on suit le rythme de l’enfant pour répondre à ses interrogations, il y a plus de chances qu’on soutienne son pouvoir d’agir et qu’il soit tenté de poser des petits gestes, non décidés et non contrôlés par l’adulte.»

 

Et nous, là-dedans?

Cette autonomie est une clé pour l’engagement... sans le découragement! Accueillir l’enfant dans ses propos, l’encourager à nous parler de ses inquiétudes et l’accompagner dans ses questionnements ou craintes n’est pas toujours facile – surtout lorsque, comme parents, on a nous-mêmes des doutes sur la suite des choses...

Selon Karine St-Jean, psychologue, une petite introspection est de rigueur avant de s’adresser à nos enfants. Quelle est notre position face aux changements climatiques? Comment y réagissons-nous? Quels sont nos outils pour réguler nos propres émotions? Une fois que nous nous sommes occupés de nos propres enjeux, nous serons plus libres pour les autres, avance-t-elle.

«Nous avons plus de chances d’écouter nos enfants avec des oreilles et un cœur ouverts, affirme Mme St-Jean, et on le fera alors en essayant de ne pas minimiser leurs propos, de ne pas les juger, de ne pas tout rationaliser.»

Elle suggère plutôt de poser des questions simples et pleines de compassion. Par exemple, comment l’enfant se sent-il, quelles sont ses peurs, que comprend-il de la crise environnementale (selon son âge et sa maturité)? Dans nos réponses, la psychologue rappelle qu’il est important d’équilibrer nos propos. «On veut rassurer sagement, dit-elle. On se base sur des faits et on répond que oui, il y a des choses qui vont bien... et que oui, il y en a qui vont moins bien. Les deux coexistent en ce moment.» 

 

Mettre cartes sur table

Bertille Marton, du CSSDM, souligne l’importance de dire la vérité, sans quoi l’enfant ne se sentira pas validé. Il pourrait choisir de ne plus aborder ce sujet avec nous ou carrément de se refermer. «On donne les informations par petites touches et on demande à l’enfant si cela répond à sa question, explique-t-elle. On essaie de ne pas aller au-delà de ses questionnements pour ne pas l’inquiéter davantage.»

Pour Germain et sa préadolescente, les choses se sont placées... lentement, mais sûrement. Charlotte a décidé de
s’impliquer à l’école (jardins collectifs et comité lié au compostage). En outre, elle a écrit à son député pour lui faire part de sa déception de ne pas voir les dirigeants bouger plus vite et plus efficacement.

«Je crois à la technique du petit pas, conclut Germain, mais je ne suis pas dupe: il va falloir un engagement sérieux du côté de la politique et des entreprises. C’est Charlotte qui m’a fait réaliser ça!» Comme quoi, ce ne sont pas que les parents qui influencent et éduquent les enfants... L’inverse est tout aussi vrai. 

 

Passer à l’action

Voici quelques exemples d’initiatives liées à la cause environnementale auxquelles les enfants et les familles peuvent participer en posant des gestes concrets.

  • Cultiver l’émerveillement: sortir et faire toutes sortes d’activités de plein air, dans la nature.
  • Gestion des matières résiduelles: faire un défi zéro déchet avec une autre famille.
  • Surconsommation: se fixer des objectifs annuels pour la consommation d’énergie, par exemple.
  • Transport: s’initier au transport actif (marche, vélo, etc.).
  • Établissement scolaire: créer un comité environnement, remettre en question certaines pratiques ou proposer de nouvelles façons de faire.
  • Sensibilisation: écrire à des médias ou aux autorités politiques de son secteur (municipales, provinciales, fédérales).
  • Entraide et solidarité: se joindre à un organisme communautaire lié à la cause environnementale de notre quartier ou de notre ville.
  • Mouvement planétaire: participer à des manifestations et des marches pour l’environnement.

 

 

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