6-12 ans

Donner de l'argent de poche: oui ou non?

Donner de l'argent de poche à notre enfant: oui ou non?

  Photographe : Getty Images

6-12 ans

Donner de l'argent de poche: oui ou non?

Pourquoi donner de l’argent de poche à notre enfant? Après tout, quand il a besoin de quelque chose, on le lui achète. C’est vrai. Mais verser régulièrement quelques dollars à notre jeune est un bon moyen de faire son éducation financière. Conseils et témoignages.

Chaque semaine, les frères Erwan, 10 ans, et Axel, 8 ans, reçoivent 5 $ en argent de poche. Un montant qui leur est versé par virement bancaire. «Ils me demandent régulièrement de leur montrer leur compte pour voir la somme qu’ils ont accumulée, dit leur mère, Gaëlle. Et quand ils ont assez d’argent, ils se procurent quelque chose qui leur fait envie. La dernière fois, ils ont acheté chacun une affiche à 40 $.»

À quel âge commencer à donner des sous? Certains disent 5 ans, d’autres 7 ou 8 ans. «L’important, c’est que l’enfant comprenne qu’il faut de l’argent pour acheter des choses et que cet argent ne tombe pas du ciel», estime Hélène Hétu, consultante budgétaire à l’ACEF Rive-Sud de Montréal.

Combien donner? «Ce que je vois le plus, c’est de 5 à 10 $ par semaine, répond François Décary, conseiller en finance solidaire et ancien directeur général de l’ACEF Appalaches-Beauce-Etchemins. Mais tout dépend de l’âge de l’enfant et de ce qu’on veut le voir gérer avec cet argent. Une pièce de 1 $ à un petit de 5 ans, c’est suffisant. Des parents donnent 25 $ à leur ado, mais ils lui demandent de payer lui-même ses repas à la cafétéria, en plus de ses petites dépenses.» On tient compte de notre situation financière. Si notre budget est serré, l’argent de poche ne devrait pas être une priorité.

 

Inculquer la valeur de l’argent

Mère seule, Andrée-Anne verse de l’argent de poche à ses garçons de 10 et 13 ans «pour qu’ils apprennent à gérer l’argent avec de petites sommes, tant qu’ils n’ont pas encore de grandes responsabilités». L’an prochain, elle compte augmenter substantiellement le montant alloué à son aîné, Boris. Avec cet argent, l’ado devra payer lui-même ses dépenses: vêtements, produits de soins personnels, activités parascolaires, sorties, billets d’autobus, etc. «Je vais l’aider à faire un budget, dit Andrée-Anne. C’est un apprentissage qui lui servira toute la vie.»

Donner de l’argent de poche est un choix bien personnel, mais si l’on adopte cette formule, il serait dommage de ne pas en profiter pour montrer à notre jeune à faire bon usage de son argent. «Les études montrent que les enfants qui en reçoivent gèrent mieux leurs finances plus tard, signale Jacinthe Cloutier, professeure adjointe en sciences de la consommation à l’Université Laval. Ils ont plus d’épargne et moins de dettes.»

La meilleure façon de procéder est de toujours verser le même montant le même jour de la semaine. Ainsi, notre jeune peut mieux planifier ses dépenses. Cela l’aide aussi à réaliser que, dans la vraie vie, on n’obtient pas nécessairement de l’argent à la demande.

 

argent de poche

© Unsplash | Jordan Rowland

 
1 $ si tu fais ton lit

Plusieurs parents accordent de l’argent de poche à leur enfant en échange de tâches. Par exemple, Julien reçoit 8 $ le samedi s’il met la table et vide le lave-vaisselle chaque jour. Est-ce une bonne idée? En général, cette méthode est déconseillée, car les tâches domestiques font partie des responsabilités familiales. En tant que membre de la famille, il est normal en effet qu’un enfant de 8 ans fasse son lit ou qu’un ado de 14 ans sorte les poubelles sans rien attendre en retour.

En outre, l’argent de poche est plus compliqué à gérer lorsqu’il est conditionnel à l’exécution de corvées. «Si l’enfant fait son lit une fois sur deux, le parent doit retrancher un montant, explique François Décary. L’enfant va peut-être argumenter et essayer de négocier.» Sans compter qu’en offrant de l’argent contre une tâche, on donne l’impression qu’elle est facultative. Facile alors pour le jeune de renoncer à sa «paye» de la semaine parce qu’il n’a pas envie de passer l’aspirateur...

Les corvées ponctuelles pourraient toutefois valoir quelques dollars: déneiger l’entrée, ranger le garage, laver la voiture, etc. Ainsi, l’enfant qui épargne pour un projet peut augmenter son pécule plus rapidement. Et si on lui explique nos attentes quant au résultat, on l’habitue à travailler de manière consciencieuse pour un salaire.

 

Comment superviser notre enfant

Doit-on laisser notre enfant acheter tout ce qu’il veut? Selon Jacinthe Cloutier, le mieux est de l’amener à réfléchir à ses choix de consommation, sans décider à sa place. «On discute avec lui, on le conseille, mais on n’impose pas, suggère-t-elle. La beauté de l’argent de poche, c’est justement la liberté de décision et l’autonomie qu’elle procure. Si on dit à l’enfant quoi acheter et ne pas acheter, il n’apprendra pas à faire des choix.»

Se questionner avant d’acheter, c’est ce qu’Aurore apprend à sa fille de 8 ans, Malaïka. «Je pense que c’est une bonne chose de l’habituer tôt à éviter les achats impulsifs», estime-t-elle. Pourquoi veux-tu ce jouet, cet accessoire? En as-tu un semblable à la maison? Es-tu certaine que tu vas l’utiliser? Veux-tu dépenser tout ton argent pour ce produit? Qu’est-ce que tu pourrais avoir d’autre pour le même montant? Voilà autant de questions qui aident la fillette dans ses décisions. «Maintenant, elle fait plus attention à ce qu’elle achète avec son argent de poche, remarque la mère de trois enfants. Elle comprend mieux la valeur des choses.»

Lorsque l’enfant a le dernier mot sur ses choix de consommation, il fait parfois des erreurs. Et c’est une bonne occasion d’apprentissage. «À cet âge, les enjeux sont minimes, souligne François Décary. Un enfant qui fait un mauvais achat perd quelques dollars. La prochaine fois, il fera peut-être un choix plus avisé.» Un avis que partage Stéphanie, mère d’Ophélie, 12 ans, et d’Auriane, 10 ans. «Même si j’encourage mes filles à réfléchir avant d’acheter, elles font parfois des achats qu’elles regrettent. Récemment, mon aînée voulait un jeu qui n’était plus vraiment de son âge. Il coûtait assez cher, et je savais qu’elle ne s’amuserait pas longtemps avec ce jeu. Je le lui ai dit, mais elle l’a acheté quand même. Se tromper, ce n’est pas grave. J’espère seulement que ça va lui servir de leçon.»

 

argent de poche

© Getty Images

 
Épargner, ça s’apprend 

Aussitôt qu’il touche son argent de poche, notre jeune dépense tout? Si l’on veut le responsabiliser, il faut qu’il en assume les conséquences. On lui rappelle donc qu’on ne lui redonnera pas d’argent avant la semaine prochaine... et on tient notre bout. Devrait-on lui accorder une avance dans certaines circonstances? Peut-être, mais cela doit demeurer une exception. À nous d’évaluer si notre enfant a une bonne raison. «Dans une optique d’éducation, il est important d’expliquer à l’enfant qu’il s’agit d’un prêt et qu’on va déduire ce montant de sa prochaine allocation, conseille Hélène Hétu. Et on le fait! On lui montre ainsi comment utiliser le crédit correctement.»

Inciter son enfant à épargner est aussi une bonne chose, selon les experts. Pour rendre cela concret et motivant, on peut proposer à notre jeune de mettre de côté une partie de son argent de poche dans un objectif précis, comme acheter une guitare. Le but à atteindre doit cependant être réaliste pour que l’enfant ne se décourage pas. S’il a de la difficulté à économiser, Hélène Hétu suggère de lui offrir une prime, par exemple ajouter 20 % à la somme qu’il aura amassée dans trois mois. «Faire preuve de discipline financière, c’est une notion de base qui va lui être utile pour le reste de sa vie», soutient la consultante budgétaire.

Certains parents, comme Andrée-Anne, proposent à leurs enfants de réserver un pourcentage de leur argent de poche aux cadeaux ou à la charité. «Je contribue moi aussi. Deux ou trois fois par année, nous choisissons en famille une cause à soutenir», nous confie celle pour qui le partage est une valeur importante. «Ça incite mes fils à s’intéresser à ce qui se passe dans la société, et ça donne lieu à de belles discussions.»

Enfin, il ne faut pas oublier qu’aux yeux de nos enfants, nos comportements à l’égard de l’argent ont souvent plus de poids que nos discours. Le premier pas pour faire leur éducation financière pourrait bien être de réfléchir à l’exemple qu’on leur donne.

 

 

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