Chat
Un chat obéissant: est-ce que ça se peut?
Photographe : Jessica Giguère
Chat
Un chat obéissant: est-ce que ça se peut?
Quand une simple invitation chez un cousin se transforme en une prise de conscience sur les raisons qui motivent les chats à adopter des comportements jugés déplaisants par les humains...
Anecdote et courtes leçons sur la meilleure façon de s’y prendre pour rendre un chat «docile».
En visite chez mon cousin et sa conjointe, je suis assis dans le salon, d’où j’ai une vue sur la salle à manger, quand, soudain, Ti-Mine, le chat de la maisonnée, grimpe sur la table. Mon cousin, voulant me montrer qu’il est un bon propriétaire de chat, regarde son compagnon et dit «NON», d’un ton ferme, mais sans crier ni avoir l’air fâché.
Ti-Mine tourne la tête lentement vers lui, mais ne bouge pas d’un iota. «Le p’tit mosus», dit mon cousin. Il ajoute, en souriant: «Normalement, il descend, mais là, comme l’éduchateur est chez nous, c’est certain qu’il va me défier et me faire mal paraître.»
C’est à ce moment que sa conjointe saisit un vaporisateur d’eau et, en un instant, Ti-Mine descend de la table. Je souris, car le vaporisateur est un outil de punition éthique réputé chez les adoptants de chats («il ne fait pas mal»). En tant qu’intervenant en comportement félin, je me dois donc de prononcer la phrase qui, je le sais, va entraîner une conversation identique à celle que j’ai presque chaque jour avec mes clients.
— Vous savez que le vaporisateur ne fonctionne pas, hein?
Mon cousin me regarde, surpris que je n’aie pas vu que cela avait bien fonctionné pour repousser Ti-Mine.
— Si, si. T’as pas vu? Nous n’avons même plus besoin de l’arroser maintenant, car il descend aussitôt qu’on pointe le vaporisateur en sa direction.
— Combien de fois dois-tu faire ça par semaine? Et est-ce que ça fonctionne à tout coup?
— Bah, on doit faire ça trois ou quatre fois par semaine. Ça fonctionne chaque fois depuis trois ans. C’est très efficace.
— Alors si cette punition est efficace, explique-moi pourquoi tu dois la répéter trois ou quatre fois par semaine et que, en trois ans, il n’a pas encore compris qu’il ne devait pas grimper sur la table?
— ... [Insérez ici des bruits de criquet.]
© Shutterstock
Le problème, c’est que les gens utilisent un moyen de punition parce que, sur le coup, cela fonctionne. Mais lorsqu’on s’attarde au véritable but de la punition, soit faire cesser le comportement déplaisant, réprimander son chat est probablement la méthode la plus inefficace qui soit. Je vous explique pourquoi et je vous livre trois trucs infaillibles pour faire en sorte que votre chat vous obéisse.
Comprendre le pourquoi
La première chose à éliminer est en lien avec les croyances populaires que les chats peuvent être jaloux, vengeurs et dominants. Ce sont des mythes. Le chat adopte un comportement pour une seule et unique raison: parce qu’il a un besoin à combler.
Donc, si nous punissons l’animal sans comprendre pourquoi il adopte un comportement indésirable, tout ce que nous faisons, en fait, c’est l’empêcher de combler son besoin. Or les chances sont qu’il va probablement trouver un autre moyen de parvenir à ses fins et que cette autre façon risque de vous déplaire tout autant. Ce qu’il faut plutôt faire, dans ce cas, c’est s’interroger sur la raison pour laquelle le chat adopte le comportement problématique.
Un peu désemparé, mon cousin me regarde et me dit: «Ok, mais ce n’est pas toujours évident de savoir ce qu’il veut. Par exemple, quand il monte sur la table, ce n’est sûrement pas pour avoir de la bouffe, car on ne mange jamais dans cette pièce.» Effectivement, il peut être parfois difficile de déchiffrer les motivations d’un chat... Et c’est pour cela que des intervenants en comportement félin existent.
Le chat qui grimpe sur la table le fait souvent parce que c’est un endroit idéal pour surveiller son environnement. Ou bien il a tout simplement compris qu’il s’agit d’un excellent moyen d’attirer votre attention: même si la réplique est désagréable et qu’elle vient avec un gros «NON» ou un petit coup de vaporisateur d’eau, le chat a atteint son objectif.
© Jessica Giguère
TRUC no1
Offrir une solution de remplacement
Une fois qu’on s’est attardé à comprendre pourquoi le chat adopte un comportement déplaisant, il devient souvent très facile de lui présenter une autre possibilité qui comblera son besoin et qui sera acceptable pour nous.
— C’est bien beau, ça, mon Dan, mais je ne suis pas pour lui acheter une table juste pour lui.
— Non, mais tu pourrais mettre un bel arbre à chat à proximité, plus haut que la table, et ainsi donner à ton animal une solution de rechange qui aura beaucoup plus de valeur à ses yeux. Entre ta table et l’arbre à chat, Ti-Mine choisira l’option qui comblera le mieux son besoin. Vous pourrez aussi le récompenser quand il ira dans l’arbre à chat en lui donnant de l’attention ou des friandises.
— Oui, je comprends, mais tu vois bien qu’on ne vit pas dans un château. On n’a pas de place pour un arbre à chat près de la table.
© Shutterstock
TRUC no2
Récompenser l’utilisation de la solution de remplacement
S’il n’est pas possible de lui offrir une autre option, vous pouvez toujours lui enseigner à adopter un comportement différent.
— J’imagine que vous ne voulez pas qu’il grimpe sur la table quand vous mangez, mais que le reste du temps, ça ne vous dérange pas tant que ça?
— Effectivement. Mais comment veux-tu demander à un chat de ne pas monter sur la table quand on a de la visite, comme ce soir?
— Demander de ne PAS faire quelque chose est l’erreur que beaucoup de gens font. Ça serait l’équivalent de demander à un chauffeur de taxi de ne PAS aller à un endroit et espérer qu’il devine notre destination. Ça pourrait lui prendre beaucoup de temps avant de la trouver. C’est pourtant ce que nous faisons lorsque nous réprimandons un chat ou que nous l’empêchons d’adopter un comportement. Il va simplement chercher à combler son besoin autrement. Une meilleure stratégie serait de lui dire exactement ce que l’on veut. Que voudriez-vous que Ti-Mine fasse au lieu de grimper sur la table?
— On veut qu’il reste par terre, dit la conjointe de mon cousin.
— Parfait.
Mon cousin avait déjà une réplique toute prête:
— Oui, mais comment enseigner à un chat à rester par terre?
— C’est très simple. Il suffit de lui montrer que c’est beaucoup plus «payant» de rester par terre que de grimper sur la table. En lui donnant des friandises pour chat AVANT qu’il monte sur la table et en le récompensant chaque fois qu’il reste par terre de plus en plus longtemps, Ti-Mine va vite comprendre. Et j’insiste sur le fait de le récompenser AVANT qu’il monte sur la table, car si c’est fait après, il va apprendre le contraire de ce que vous voulez lui montrer et croire qu’il doit d’abord monter sur la table pour voir la friandise apparaître au sol.
© iStock
TRUC no3
Rendre un comportement désagréable
Mais qu’en est-il des situations où l’on ne peut pas offrir une solution de remplacement à notre chat?
Mon cousin avait une autre réplique toute prête:
— C’est bien beau, ça, mais comment je fais pour empêcher Ti-Mine de grimper sur la tablette où se trouve l’urne de mon père? On ne peut pas toujours le surveiller pour lui donner des friandises avant qu’il grimpe. On travaille, tu sais.
— Si c’est la curiosité qui motive Ti-Mine à vouloir grimper là, tu pourrais alors rendre l’accès à cet endroit désagréable pour lui. Par exemple, tu pourrais mettre du ruban gommé double face sur la tablette du bas, puisqu’il doit passer par là pour se rendre sur celle qui supporte l’urne. Ceci est un moyen d’éducation éthiquement très acceptable, qui ne fait pas mal au chat et qui rend désormais le comportement déplaisant. Donc, logiquement, ton chat devrait abandonner cette mauvaise habitude, car elle sera devenue fâcheuse. Mais, et j’insiste, cela ne fonctionnera que s’il n’y a pas d’autre motivation qui le guide, comme celle de vouloir établir un autre poste d’observation, ailleurs que sur la table. Dans ce cas-là, lui offrir une solution de remplacement à proximité serait mieux.
La soirée s’est terminée par un magnifique repas, avec Ti-Mine assis par terre, près de la table, tranquille, qui attendait patiemment ses friandises. Le temps d’un souper, le problème était réglé!
