Psychologie

Attaques virtuelles: des blessures bien réelles

Attaques virtuelles: des blessures bien réelles

  Photographe : Marie-Eve Tremblay | Colagene.com

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Attaques virtuelles: des blessures bien réelles

Célibataire depuis un bon moment, je me suis inscrite à une téléréalité sur un coup de tête, encouragée par mes amies. J’avais 27 ans, pas d’attache et, étant une fille qui mord dans la vie, c’était loin d’être ma première ou ma dernière folie! En plus, le tournage devait se dérouler à Whistler. Il n’en fallait pas plus pour me convaincre!

Arrivée sur place, j’ai constaté que le candidat de mes rêves (un passionné de snowboard) n’y était pas, ce qui ne m’a pas empêchée de vivre de très beaux flirts. Surtout, j’y ai tissé des amitiés profondes qui, près de 10 ans plus tard, enrichissent toujours ma vie. C’est donc avec un bilan optimiste que je quittais l’aventure. 

Ça, c’était avant d’ouvrir Facebook! Aujourd’hui, tout le monde sait que la participation à une téléréalité apporte son lot de trolls sur les réseaux sociaux mais, en 2010, le phénomène était encore récent. Même l’équipe de production a été dépassée par ce qu’on pouvait lire sur moi. Plusieurs pages ont été créées dans le seul but de me détester en groupe. Cette intimidation de masse m’a profondément blessée.

Mais pourquoi des gens s’attaquent-ils à des personnalités sur les réseaux sociaux? «Chacun de nous garde une dose de colère en lui et certaines personnes la laissent s’exprimer là où ça n’a aucune conséquence pour elles. Elles se défoulent sur une personne qu’elles identifient davantage à un personnage et envers laquelle elles ne ressentent pas d’empathie», explique la psychologue Rose-Marie Charest.

Heureusement, ma famille, mes amis et moi savions quelle était ma nature profonde. Pour cette raison, je n’ai jamais baissé les yeux et j’ai continué à sortir. Cette décision d’affronter la tempête et de ne pas rester recluse en attendant qu’elle passe a été la bonne, car ce sont les gens que j’ai rencontrés durant cette période trouble qui ont mis un baume sur mes blessures. Pas les personnes cachées derrière leur écran, mais toutes celles à qui je parlais à l’épicerie, au gym ou dans les télésièges, sur les pentes de ski. Après une minute de conversation, elles me confirmaient m’avoir mal jugée et vantaient mon sourire franc. Celui-là même qui m’avait valu tant d’insultes virtuelles.

L’attitude de l’ex-participante est exactement celle que la psychologue Rose-Marie Charest suggère d’adopter dans ce genre de situation: «La victime d’intimidation virtuelle doit d’abord se mettre à l’abri – ne pas tout lire – et laisser la haine à celui qui l’exprime. Embarquer dans cette spirale ne mène à rien. Cette personne doit s’entourer de personnes qui la connaissent vraiment, l’apprécient et l’aiment.»

Je ne retournerai jamais sur Facebook; la douleur y a été trop vive. Au fil des ans, j’avoue aussi avoir refusé 90 % des demandes d’entrevue que l’on m’a faites par peur de représailles sur les médias sociaux. Il n’en demeure pas moins que je ne cultive pas d’amertume face à mon expérience. Celle-ci n’a pas altéré la fille ouverte et prête à l’aventure que j’étais et que je suis toujours. Ce n’est pas parce que je n’ai pas trouvé l’amour romantique sous l’œil de la caméra que j’y ai renoncé. Cela a d’ailleurs été un moteur qui m’a donné envie d’écrire. Pendant que certains répandaient leur fiel sur Facebook, mon imaginaire, lui, carburait à l’espoir et au romantisme. Écrire mes romans Montagnes russes et À moi la liberté! a été en quelque sorte une thérapie contre l’intimidation que j’ai subie gratuitement de la part de parfaits inconnus. Ne pas se fier aux apparences et privilégier le contact humain sont des thèmes au cœur des histoires que je raconte.

Je ne cultive pas de ressentiment face aux téléréalités, bien au contraire! Je ne boude pas mon plaisir et j’en consomme encore. J’embarquerais même peut-être dans une téléréalité qui dépeindrait la vie haute en couleur d’une famille avec de jeunes enfants comme la mienne! Étant l’heureuse maman d’une fille de trois ans et d’un garçon de quelques mois, je peux affirmer qu’il y a de l’action chez nous! Je partage aussi ma vie avec un conjoint et père merveilleux... un snowboarder qui a passé sa jeunesse sur les pentes de l’Ouest canadien! J’ai bien fait d’y croire encore...

 

Joève Dupuis était de la cuvée 2010 d’Occupation Double.

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