Santé

Le cercle vicieux des décongestifs

Le cercle vicieux des décongestifs

Istockphoto.com Photographe : Istockphoto.com Auteur : Coup de Pouce

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Le cercle vicieux des décongestifs

La congestion nasale est le symptôme dominant du rhume et de la grippe. On la soigne avec un décongestif. Voici nos mises en garde.

Les virus du rhume et de la grippe déclenchent plusieurs signes et symptômes au niveau nasal. En réaction inflammatoire, les vaisseaux sanguins du nez augmentent leur production de mucus et, comme devant toute agression microbienne, ils se dilatent pour ouvrir la voie aux défenses du corps. Cette enflure des vaisseaux sanguins bloque l'intérieur des narines et diminue la quantité d'air qui passe par le nez lors de la respiration.

Le rôle des médicaments décongestifs est donc de refermer les vaisseaux sanguins à l'intérieur du nez pour contenir les débordements de la réaction inflammatoire: c'est la vasoconstriction. Cet effet diminue ainsi l'enflure de chaque côté des fosses nasales et facilite le passage de l'air dans les voies respiratoires.  

Les décongestifs à prendre par la bouche

Il y a actuellement sur le marché deux produits utilisés dans les décongestifs oraux: la pseudoéphédrine et la phényléphrine, qui sont des vasoconstricteurs.

Malheureusement, le rétrécissement des vaisseaux sanguins causé par les décongestifs ne se limite pas à la muqueuse du nez. Les décongestifs pris par la bouche circulent dans tout le corps et causent aussi une vasoconstriction au niveau des autres vaisseaux du corps, ce qui peut faire augmenter la pression sanguine.

De plus, ces médicaments peuvent accélérer le rythme du coeur et causer des arythmies. C'est le principal problème qui a été rapporté chez les joueurs de hockey qui utilisaient la pseudoéphédrine comme stimulant, car les décongestifs ont aussi un effet stimulant que recherchent des sportifs ou des étudiants à la veille de leurs examens...

Ainsi, plusieurs personnes ne peuvent dormir si elles prennent des décongestifs au coucher. On recommande d'ailleurs toujours de les prendre au moins quatre heures avant d'aller dormir. Pour diminuer l'effet stimulant, on leur associe souvent un antihistaminique qui cause de la somnolence. Toutefois, il est difficile de prédire si l'effet soporifique de l'un agira sur l'effet stimulant de l'autre au niveau du système nerveux central. De plus, plusieurs médicaments contre le rhume et la grippe sont faits pour libérer leurs ingrédients pendant 12 heures. Un décongestif à longue action, même pris en après-midi, peut donc nuire au sommeil au moment du coucher, le soir.

Lire notre dossier sur les maladies de l'odorat.

 
Des personnes à risque

L'étiquetage des décongestifs oraux comporte des mises en garde pour les personnes qui présentent de l'hypertension, une maladie cardiaque, un glaucome, des troubles thyroïdiens, un diabète, une hypertrophie bénigne de la prostate. Les femmes enceintes et celles qui allaitent doivent aussi consulter un pharmacien ou un médecin avant de consommer des décongestifs.

Chez les personnes qui ont un glaucome à angle fermé, les décongestifs risquent d'augmenter leur pression intraoculaire, ce qui peut causer rapidement des dommages irréparables au niveau de l'oeil. Dans le cas des troubles thyroïdiens, les personnes à risque sont surtout celles dont la glande thyroïde fonctionne trop ou dont on est en train d'ajuster la dose nécessaire d'hormones thyroïdiennes.

Chez la personne diabétique, toute infection peut faire fluctuer les valeurs de glycémie. Le taux de sucre peut donc augmenter et les besoins en insuline varier pendant un rhume ou une grippe. Les décongestifs peuvent amplifier les variations de glycémie.

Le bon médicament à la bonne dose

La pseudoéphédrine et la phényléphrine se retrouvent presque toujours associées à d'autres médicaments qui ajoutent leurs effets indésirables à ceux des deux premiers.

La concentration efficace de pseudoéphédrine chez l'adulte est de 60 mg par dose, celle de phényléphrine est de 10 mg. La plupart des associations contiennent la moitié de ces doses, soit 30 mg de pseudoéphédrine et 5 mg de phényléphrine. La posologie recommandée sur l'emballage par le fabricant indique alors de prendre deux comprimés à la fois. Ceci comporte des risques puisque l'on double alors aussi les autres ingrédients présents dans ces associations de médicaments.

Attention aux formes pharmaceutiques: les décongestionnants se retrouvent aussi sous forme de sirops apparemment anodins, ou encore au nombre des ingrédients de boissons réconfortantes aux saveurs de simili-bouillon de poulet ou de tisane pomme et cannelle.

La congestion nasale: pas toujours causée par le rhume ou la grippe

D'autres conditions peuvent causer une congestion nasale: les allergies et la présence de polypes dans le nez. On estime aussi que 13 % des femmes enceintes développent une congestion nasale causée par l'augmentation de la progestérone. Il vaut alors mieux consulter le médecin ou le pharmacien plutôt que d'essayer de se traiter soi-même.

Les décongestifs en vaporisateurs

Parmi les conditions qui peuvent causer une congestion nasale, il faut également citer les décongestifs eux-mêmes, non pas ceux qu'on prend par la bouche, mais bien ceux qu'on utilise ou qu'on sur-utilise en vaporisateurs ou en solutions nasales. Je vous les avais gardés pour la fin.

Ici, on ne parle pas, évidemment, des solutions salines qui sont inoffensives, mais plutôt des solutions à base de phényléphrine et de xylométazoline. Ces décongestifs ont moins d'effets secondaires systémiques que les décongestifs oraux, mais ils en ont d'autres. Ces solutions agissent localement et plus rapidement qu'un décongestif oral, mais leur effet est souvent plus court et moins complet puisqu'ils ne décongestionnent que la portion du nez avec laquelle ils entrent en contact.  Ils causent une irritation locale au niveau de la muqueuse du nez et ils sont responsables d'une congestion rebond qui peut apparaître après seulement trois jours d'emploi. Cette congestion conduit à prolonger l'usage du décongestif nasal qui continue de causer une congestion: c'est un cercle vicieux appelé «rhinite médicamenteuse», laquelle qui peut durer des années.  Plusieurs personnes sont dépendantes à ces petits vaporisateurs. Plusieurs d'entre elles ne se doutent même pas des effets pervers de leur médecine. Informez-les: vous leur ferez du bien.

Sources
PRAY, W.S., «The Common Cold and Related Conditions» dans Nonprescription Product Therapeutics, Second Edition, 2006;235-65.

LAMARRE, D., «Médicaments contre les symptômes du rhume et de la grippe»., Le médecin du Québec, 2001; 36(9) : 43-53.

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