Argent et consommation

Témoignages: être heureux avec moins d'argent

Témoignages: être heureux avec moins d'argent

Thinkstock Photographe : Thinkstock Auteur : Coup de Pouce

Argent et consommation

Témoignages: être heureux avec moins d'argent

Julie Roy, 39 ans, pigiste

Il y a huit ans, Julie et son conjoint, Maxime, étaient à la recherche d'une maison à acheter. Tous deux sur le marché du travail, elle dans l'édition et lui, ingénieur, ils auraient pu se permettre une belle grande demeure de 400 000$. Ils n'en n'ont rien fait. Au lieu de ça, ils ont jeté leur dévolu sur une petite et imparfaite maison de la Rive-Sud à 130 000$, qu'ils rénovent eux-mêmes à temps perdu. «Ce n'est pas la maison de mes rêves, admet Julie. Mais on voulait absolument pouvoir la payer avec un seul salaire.» À ce prix-là, le couple s'achetait en fait la liberté. Celle de pouvoir changer de rythme de vie, sans jamais être pris à la gorge.

Changer de rythme, le couple l'a d'ailleurs fait à quelques reprises depuis. Par exemple, lorsque leur deuxième enfant est né, il y a cinq ans, Julie n'a pas hésité à prendre une année complète de congé tandis que son conjoint s'est offert deux années de papa à la maison à temps plein. C'est ce genre de luxe que le couple aime vraiment. Un autre «luxe» que Julie s'est permis il y a un peu plus d'un an: quitter un bon emploi à temps plein pour retourner à la maison. Et, malgré quelques piges comme journaliste, le budget familial s'est quand même vu amputé d'environ 30%. «Je trouvais qu'on courait beaucoup et je ne voulais plus ça, explique-t-elle. J'ai pu faire ce choix sans que le facteur financier entre en ligne de compte simplement parce qu'on a opté pour un mode de vie plutôt modeste.» Julie a d'ailleurs profité de ce ralentissement pour consacrer un peu de temps aux études. «Je suis retournée à l'université pour suivre un cours qui me passionne vraiment », raconte-t-elle.

Si elle est prête à débourser un peu d'argent pour étudier une matière qui l'allume ou pour acheter de la nourriture de qualité à sa famille, Julie estime que plusieurs autres dépenses sont tout à fait inutiles. Ainsi, elle n'hésite pas à accepter un divan ou une télé qu'on veut bien lui donner, le magasinage ne fait pas partie de ses loisirs, ni les sorties d'ailleurs, et jamais elle ne dépenserait des sommes astronomiques en vêtements, que ce soit pour elle ou pour ses enfants. «Ma mère était prof de piano et quand j'étais petite, certaines de ses élèves lui apportaient parfois des vêtements pour moi, se rappelle Julie. Elle ne les refusait pas, même si on n'était pas du tout pauvres. Je n'ai donc jamais associé le fait de recevoir des choses gratuitement à la pauvreté. C'est simplement que je trouve dérisoire de dépenser beaucoup d'argent pour certaines choses.» Une question de valeurs et de choix. Pas de dettes astreignantes, beaucoup moins de stress, une vie axée sur la famille (un nouveau membre est d'ailleurs arrivé il y a quelques mois!) et le sentiment de vivre en accord avec soi-même. «Même si des fois, je trouve que ma maison est un peu ordinaire, dit Julie, je réalise que tous les choix qu'on fait en valent vraiment la peine.»

Isabelle Bergeron

Lucie Godin, 62 ans, préretraitée

Lucie a travaillé en commercialisation pour des entreprises comme McDonald's, Uniprix et Trévi pendant 25 ans. Un univers stressant et exigeant, mentalement et physiquement. «Je n'ai jamais connu les semaines de 40 heures!» lance-t-elle. Mais le salaire suivait: entre 50 000$ et 75 000$, selon les années, et un gros compte de dépenses. Et, bien qu'elle déteste magasiner, Lucie trouvait toujours le moyen de presque tout dépenser! Coiffure, manucures, vêtements, oeuvres d'art... «Par contre, je ne me suis jamais endettée, dit-elle. Je remercie mes parents, qui m'ont transmis cette discipline financière.»

En 2002, à 51 ans, Lucie s'est retrouvée entre deux emplois. Au même moment, sa belle-soeur partait faire du bénévolat au Pérou pendant quelques semaines. «Ça a réveillé un vieux rêve, confie-t-elle. J'avais visité le pays à l'âge de 20 ans et j'avais toujours voulu y retourner.» Grâce à l'organisme où avait oeuvré sa belle-soeur, Lucie a réussi à trouver un foyer pour garçons qui était prêt à l'accueillir en échange de menus travaux. «Deux mois plus tard, je débarquais à Lima avec mes valises et un dictionnaire sous le bras, car je ne parlais pas un mot d'espagnol!» Elle y passera trois ans, travaillant notamment à amasser des fonds pour le foyer où vivaient 135 garçons et qui opérait dans une pauvreté extrême. «Un hiver, on a même manqué d'électricité pendant neuf semaines!» se souvient Lucie.

Arrivée au bout de ses économies, Lucie est revenue à Montréal, dans son ancien appartement, qu'elle avait loué entre-temps à son neveu. Un choc. «J'avais des vêtements, des souliers, de la vaisselle et de la literie pour une armée, dit-elle. J'ai rempli un camion et j'ai tout donné à un organisme de charité. La surabondance et le gaspillage me donnaient le tournis.» Incapable de retourner à son ancien travail, Lucie a intégré l'entreprise de son frère, à 15$ de l'heure. «Moins de la moitié de mon ancien salaire!» Conséquemment, c'est toute sa façon de consommer qui a changé. «J'achète peu et je réutilise tout, même les emballages en pellicule plastique de l'épicerie, explique-t-elle. Je magasine mes assurances chaque année pour obtenir le meilleur prix, je lave à l'eau froide et je n'utilise plus ma sécheuse. J'emprunte des livres à la bibliothèque. Je profite des rabais de la carte Accès Montréal et je vais au théâtre ou au cinéma l'après-midi, à prix réduit. J'ai un compte de banque sans frais de gestion. Et j'en passe!»

Il y a quatre ans, le budget de Lucie a encore baissé quand elle a pris une retraite anticipée, après un deuxième séjour de 6 mois au Pérou. Son revenu annuel: environ 20 000$. «J'ai découvert que je suis très heureuse avec peu, soutient-elle. Même si je gagnais un million demain matin, je ne changerais absolument rien.»

Geneviève Bonneau, 25 ans, mère à la maison

«Mon conjoint et moi avions déjà chacun un enfant quand nous nous sommes rencontrés, en 2008. Ma fille avait 1 an et son fils, dont il a la garde partagée, en avait 5. Rapidement, nous avons eu envie d'avoir d'autres enfants ensemble, raconte la jeune maman. Notre fils est né en janvier 2011. Quand il a eu 9 mois, une place à la garderie de sa soeur s'est libérée et j'ai recommencé à travailler.» Mais les 40 minutes passées quotidiennement dans le trafic pour se rendre au travail et un horaire de technicienne en arpentage imprévisible ont vite rendu la situation pénible. «Le soir, je me précipitais à la garderie pour aller chercher les enfants, les faire souper et les reconduire à leurs activités.» Les fins de semaine, elles, étaient destinées aux courses et au ménage. «Sans compter que mon conjoint, qui est gérant d'une ferme porcine, travaillait une fin de semaine sur deux! ajoute Geneviève. J'étais fatiguée, irritable et stressée.»

Au bout de cinq mois, Geneviève a fait une dépression. «Je pleurais tout le temps et je n'arrivais plus à me lever le matin. Mon médecin conseillait un arrêt de travail, mais financièrement, c'était impossible», raconte-t-elle. Geneviève et Daniel ont dû se rendre à l'évidence: ils ne pouvaient plus continuer comme ça, d'autant qu'ils envisageaient d'avoir un autre enfant.

Ils ont donc dû remettre leur mode de vie en question. Quelles concessions étaient-ils prêts à faire? Ils ont commencé par troquer leur grande maison pour une plus petite, trois fois moins chère. «Les enfants n'ont plus chacun leur chambre, mais ce n'est pas grave!» Ils ont aussi remplacé une de leurs deux voitures neuves par un modèle d'occasion. Puis, ils ont coupé la ligne fixe de leur téléphone pour ne garder que leur téléphone intelligent. «Grâce à tous ces changements, j'ai pu arrêter de travailler, dit Geneviève. Je suis tombée de nouveau enceinte tout de suite après!»

Sans le salaire de Geneviève, le couple se prive d'un revenu de 28 000 $ par année. En retirant les enfants de la garderie et en économisant sur les dépenses liées au travail (essence, lunchs, vêtements), soit environ 700$ au total, Geneviève et Daniel y arrivent! «On fait un budget mensuel et on s'en tient au nécessaire», explique Geneviève. Vêtements de seconde main ou en solde, cadeaux faits maison, sorties au cinéma et au restaurant réduites au minimum... Tous des trucs qui font en sorte que la petite famille s'en tire plutôt bien. Et même très bien! «Les effets sont au-delà de nos attentes, affirme Geneviève. On est moins stressés et les enfants aussi. Je n'ai plus besoin de les presser le matin et je laisse ma fille m'aider à cuisiner, même si c'est plus long. Je trouve de la satisfaction en bricolant avec les enfants ou en cuisinant de nouvelles recettes. Même si je ne travaille plus, je me sens plus accomplie. On est définitivement plus heureux!»

Pour aller plus loin
1 L'ABC de la simplicité volontaire, par Dominique Boisvert, Écosociété, 2005, 162 p., 15 $. 2 Le Réseau québécois pour la simplicité volontaire, simplicitevolontaire.org. Une véritable mine d'informations: pistes de réflexion, suggestions de lecture, conseils, etc.

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