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La cuisine moléculaire: on n'arrête pas le progrès!

La cuisine moléculaire: on n'arrête pas le progrès!

iStockphoto Photographe : iStockphoto Auteur : Coup de Pouce

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La cuisine moléculaire: on n'arrête pas le progrès!

Les progrès de la haute gastronomie combinés à la science moléculaire ont donné lieu à une cuisine réinventée, appelée cuisine moléculaire, qui éveille tous les sens... pourvu qu’on ait les moyens de se l’offrir.

C'est le chef Ferran Adrià qui nous a fait connaître la cuisine moléculaire et qui continue de la faire rayonner à travers le monde grâce à ses conférences et ateliers. Sacré meilleur au monde à cinq reprise entre dans les années 2000, son restaurant El Bulli, à Barcelone, était à l'avant garde du monvement. Dans ses cuisines, le chef Adrià pratiquait, entre autres, la sphérification de fruits avec l'alginate de sodium, la sculpture de betterave, le traitement des textures par l'azote liquide et la momification avec de la barbe à papa. Cette réinvention de la nourriture n'a rien à voir avec la valeur nutritive de l'aliment, mais procure un ravissement des yeux et de la langue.

Les aliments fonctionnels

Plus proche de nous, la science moléculaire fait aussi son oeuvre dans ce qu'on appelle les aliments fonctionnels, que les Français nommaient il n'y pas si longtemps les «alicaments». Obsédée par l'obsession de santé de ses clients, l'industrie cherche sans cesse à améliorer la qualité nutritive de ses produits: elle verse de l'huile de poisson dans les yogourts, elle assaisonne les céréales à déjeuner de bactéries probiotiques et elle ajoute des fibres au jus d'orange, par exemple. 

La science des aliments

Traditionnellement, l'industrie s'est toujours servi de la science: pour augmenter le rendement des productions agricoles, pour prolonger la vie des aliments qu'elle transforme, pour accroître la palette des saveurs et des textures dans ses propositions, entre autres. Cela s'est traduit par des agents de conservation, des colorants et des saveurs artificielles... 

La clientèle de plus en plus préoccupée par son apparence a ensuite incité l'industrie à modifier son offre: on a vu apparaître des produits «allégés» en sucre, en sel ou en gras, mais qui restaient assez peu nutritifs. Après la peur d'engraisser, le public s'est mis à craindre le cancer et les maladies cardiovasculaires: moins de sucre ne voulant pas dire meilleur pour le coeur ou le système immunitaire, l'industrie continue de récupérer les grandes découvertes scientifiques pour proposer des produits qu'elle dit «améliorés», que ce soit par l'ajout de fibres, de vitamines ou de minéraux. On essaie de séduire un public de plus en plus préoccupé par sa santé, mais on l'induit souvent en erreur: tout ce qu'on ajoute dans les emballages n'est pas nécessairement assimilé au mieux par l'organisme.

Les progrès de la haute gastronomie

De son côté, la haute cuisine, fief habituel de la fraîcheur, de la qualité et de l'exaltation de la saveur naturelle des aliments, utilise de plus en plus, comme l'industrie, les dernières données scientifiques pour varier son offre.  

Poussée elle aussi par la fièvre du progrès, la haute gastronomie semble paradoxalement assez indifférente à l'obsession de la santé et à la peur des maladies.

Certes, les grands chefs ont troqué le beurre pour l'huile d'olive et ils ont fait leur deuil de ces midis bénis où leurs clients faisaient leur fortune en arrosant copieusement leur repas des meilleurs vins. Autre temps, autres mœurs. Les clients ne viennent plus dans les grands restaurants pour se «taper la cloche» dans une débauche de luxe. Ils y viennent pour assister à un spectacle auquel tous leurs sens sont conviés.

Maintenant, comme Ferran Adrià, nombreux sont les chefs transformés en savants: Pierre Gagnaire à Paris, Thierry Marx à Pauillac, Heston Blummenthal en Angleterre, Gérard Passédat à Marseille, et leurs nombreux émules partout dans le monde. Nourrir signifie désormais deux choses: bourrer, à l'image des fournées de nos grands-mères, ou éblouir.

Mais on est bien content d'avoir dans sa poche de la nourriture d'astronaute quand on part en balade. Et ce n'est pas à la maison qu'on voit son oeuf léviter au-dessus de son assiette parce que le chef en a extrait le principe gravitationnel...

C'est tout ça le progrès. 

Sources:

Testard-Vaillant P. - Le sacre de la cuisine expérimentale - Science & Vie, No 238, mars 2007 pp 22-29.

 

Pour des images de El Bulli 

 

Monnier E. - Ce que manger veut dire -  Science & Vie, No 238, mars 2007 pp 38-48.

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